vendredi 1 août 2014

TEXTE DE CECILE DUFAY / La performance Voi(x)r(e) Acte II.

Lors de l'Acte II VOI(X)R(E) à la Galerie MondapArt, Charlotte L'Harmeroult explore la sensorialité de la matière pour mieux aborder l'invisible. Et interroger la notion du vide. Véritable écrin préparatoire à cette performance, l'ensemble de la galerie est conçu comme une installation mettant en lien le "trois fois rien" et la notion de vie spirituelle, ce je-ne-sais-quoi qui tire le fil rouge de nos plus intimes convictions.







C'est dans ce cadre exceptionnel, où toute l'exposition sert le propos de l'installation et lui donne corps, que le corps de l'artiste va déployer tout le sens complexe des voix, des voies, du voir. Et de la vie, qui circule, naît, s'épanouit, interroge, meurt... Et interroge à nouveau. 









Charlotte prend vie, doucement, cousue/recousue par Romain Azzaro dans un anti-linceul. Blanche striée de rouge, cette robe d'un genre nouveau, improvisée devant l'œuvre de fil rouge la plus longue et tendue de l'expostion, devient une forme pure irriguée des vaisseaux de la vie qui s'anime. 






Charlotte s'éveille, se met en marche, monte les marches, circule comme le sang de son œuvre qui l'entoure tout entière, matrice auto-générée. 












Arrivée à l'étage, elle surplombe le sujet et se met en scène, tête au mur, ailes d'oiseau mort, face à l'autel au Roi, couvert de pensées sur le sens de la vie qui demeure, qui ne peut disparaître tout à fait. 




Et c'est le coeur du voir qui bat : Charlotte chute dans les dépouilles pleines de dentelles de ses ancêtres, et parle, elle veut "Tuer l'optique", le voir est dangereux, ambigü : celui qui voit peut-il entendre ? Ce qui se voit est-il bien signifiant ?
Elle se relève et c'est le cri après la scansion, Charlotte veut qu'on la voie ET qu'on l'écoute, elle nous regarde par l'effet d'un miroir, nous parle de ce qui ne se voit pas et existe intensément. 












Le public est concentré, l'entoure, elle reprend son mouvement d'irrigation au milieu de l'assistance, elle évolue dans son oeuvre ET dans le public de sa performance, le public fait partie de l'œuvre en étant son reflet. Le miroir qui renvoyait/troublait son image d'artiste envoie à présent au public une nouvelle vision de lui-même; sur l'oiseau rose et dur comme la chair tendue sur un squelette, ce miroir nous regarde tandis que les mots de l'artiste résonnent encore dans le lieu, dans les poitrines... et vibrent dans nos yeux. 

Cécile Dufay, commissaire d'exposition indépendante et galeriste nomade.